Bonjour,
Tous ceux qui fréquentent les marchés y trouvent en ce moment de nombreuses variétés de choux. Je vais vous parler de ce légume qui, bien qu'ayant un intérêt nutritionnel certain, apparaît de moins en moins souvent dans nos assiettes.
Tous les choux dérivent d'un même ancêtre, le chou sauvage ou "chou des falaises", Brassica oleracea, originaire de la frange littorale océanique de l'Europe de l'ouest, qui pousse encore spontanément sur les rivages de l'océan et particulièrement en France (Normandie, Nord-Pas-de-Calais, Poitou-Charentes). Très vite, ce chou est cultivé et gagne le bassin méditerranéen dès l'Antiquité. Les Grecs et les Romains le vénéraient. La légende dit que le chou serait né des larmes de Lycurgue, roi des Edoniens. Celui-ci aurait combattu et repoussé Dionysos venu envahir la Thrace pour y faire connaître le vin. Pour le punir, Rhéa, la déesse de la terre, grand-mère de Dyonisos, le rendit fou. Prenant son fils Dryas pour un pied de vigne, Lycurgue le tua à coups de serpe. Désarmé par les Edoniens, il fut torturé et écartelé et pleura de douleur avant de mourir. De ses larmes poussèrent des choux...
Est-ce cette légende qui a fait croire que le chou avait la propriété d'être l'ennemi du vin et de faire résister à l'ivresse? En tout cas, les Grecs et Romains y croyaient et mangeaient du chou lors des banquets bien arrosés. Il paraîtrait que la tradition s'est perpétuée jusqu'à nos jours dans les pays de l'Est où l'on croque quelques feuilles crues de chou avant de boire de la vodka. Les Anciens avaient certainement raison puisqu'un chercheur de l'Université du Texas aurait récemment extrait du chou une substance active contre les effets de l'alcoolisme.
Caton l'Ancien, Hippocrate, Galien, Pline, ... ne tarissaient point sur les éloges du chou. Ils lui reconnaissaient de nombreuses vertus curatives. "On peut, suivant Caton, le manger cru ou cuit; il est également salutaire : il n'est aucun remède dont le chou ne puisse tenir la place; il porte aux urines; il lâche le ventre, ou le resserre à volonté." (Dictionnaire des Sciences médicales, tome cinquième, Paris, Panckoucke, 1813).
Longtemps, le chou a été utilisé pour ses propriétés médicinales. On l'utilise pour les emplâtres pour les blessures, les marins en embarquent lors de leurs expéditions pour lutter contre le scorbut... Mais il joue aussi un rôle important dans l'alimentation avant la découverte de l'Amérique et l'introduction des végétaux d'origine américaine. Pendant de nombreux mois, il est l'élément fondamental de la nourriture.
Juan Sánchez Cotán - Bodegón con el membrillo, la col, el melón y el pepino -
San Diego Museum of Art
Il existe de très nombreuses variétés de choux : le chou blanc, le chou vert, le chou rouge, le chou frisé, les choux cabus, les choux de Bruxelles... sans parler des choux-fleurs, des brocolis, des choux romanesco...
Le chou, ce "régal des paysans" d'après Alexandre Dumas, n'est plus consommé régulièrement en France. Les Français n'en mangent plus que 3 kg par personne et par an. Et pourtant les nombreuses études menées depuis quelques dizaines d'années ont montré que c'était un "aliment prévention" très intéressant. C'est en effet un légume peu calorique (22 kcal pour 100 g), riche en vitamines (provitamine A, vitamines C, E et B9...), en minéraux et en fibres. De plus, il contient des substances telles que les indoles, les isothiocyanates et les dithiolthiones qui semblent avoir de puissants effets anti-carcinogènes. Les nombreuses expérimentations menées, tant chez l'animal que chez l'homme, confirment l'action bénéfique d'une consommation régulière de légumes crucifères - dont le chou - dans la prévention du cancer du colon et de l'estomac mais aussi du cancer du poumon, de l'oesophage, du rectum ou de la vessie.
Je ne peux donc que conseiller à tous de manger du chou, sauf à ceux qui ont des problèmes thyroïdiens. En effet, le chou, comme tous les légumes crucifères, contient une substance soufrée, la thio-2-oxazolidone ou goitrine, qui peut (pour une consommation régulière de quantités abusives) s'opposer à l'action de l'hormone thyroïdienne, au point de provoquer un goitre.
A ceux qui ont les intestins fragiles, je conseille, pour la consommation en salade, de toujours blanchir quelques secondes à découvert les choux coupés le plus finement possible, pour permettre d'éliminer une partie des dérivés soufrés qui sont responsables de flatulences.
Dans tous les cas, il y a lieu d'enlever les feuilles extérieures et le trognon trop fibreux.
Je vais maintenant vous confier une recette originale de chou, celle du chou vert au saumon.
Chou vert au saumon
Pour 4 personnes :
1 chou moyen
400 g de filet de saumon frais (ou surgelé)
6 cuillerées à soupe de sauce de soja
2 cuillerées à soupe d'huile d'olive
3 cuillerées à soupe de graines de sésame
2 cuillerées à soupe de coriandre fraîche
Partager le chou en 4 quartiers. Supprimer les premières feuilles extérieures, le trognon ainsi que les grosses côtes extérieures des feuilles. Laver les quartiers à grande eau en écartant un peu les feuilles. Tailler ensuite les quartiers en julienne.
Faire revenir le chou dans une cocotte ou un wok avec l'huile d'olive pendant quelques minutes jusqu'à ce que le chou ait un peu ramolli. Ajouter la sauce de soja et laisser revenir encore pendant 5 à 10 minutes, puis le saumon coupé en gros cubes. Quand le saumon est cuit (plus ou moins suivant votre goût), le plat est prêt. Servir chaud avec les graines de sésame et la coriandre ciselée.
Bon appétit !